Urbanisme

Remanier le patrimoine selon Vurpas Architectes

Par Sipane Hoh, le 29 novembre 2023.
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© Kévin Dolmaire

Intervenir sur un monument historique pour y introduire un programme conséquent dans le but d’y abriter la Cité de l’économie créative et de l’ingénierie numérique est une tâche ardue qui nécessitait un très grand savoir-faire. L’agence Vurpas Architectes y est arrivée et le résultat est tout simplement remarquable.

Le site est extraordinaire. Il s’agit d’un territoire périphérique avec un caractère rural des bords de Saône qui est devenu petit à petit intrinsèque à la ville de Chalon-sur-Saône. En effet, l’ancien Moulin de la Sucrerie Blanche, bâtiment inscrit au titre des monuments historiques, est situé dans un lieu où le passé a laissé des traces indélébiles. « Ce qui nous a plu, c’est qu’il s’agit d’un bâtiment dans un environnement chamboulé et chargé de plus de 200 ans d’histoire industrielle » raconte l’architecte Julien Leclercq. Il s’agissait donc d’une opération où l’enjeu était de garder le plus possible l’âme du lieu. L’homme de l’art nous précise que l’état général de la bâtisse était très dégradé même si le gros œuvre n’était pas structurellement atteint, l’ensemble était insalubre et les planchers bois fragilisés. C’est un véritable travail collectif qui a été mené, « tout le monde s’est prêté au jeu » et vu l’ampleur de la besogne, l’exercice a nécessité une grande coordination. Pour le choix des matériaux, les architectes ont travaillé avec leurs homologues des bâtiments de France, la Direction régionale des affaires culturelles. Garder certains éléments, apporter des changements sur l’existant tout en préservant l’esprit du lieu, nécessite beaucoup de temps et une grande haleine. Pour illustrer le travail fourni, l’architecte cite l’exemple de l’ébénisterie où intervenir sur une seule pièce sollicite une minutie et précision mais une fois le travail accompli, cela donne une grande satisfaction.

Vers une nouvelle destination

Après avoir vécu de nombreuses vies, l’ancien Moulin de la Sucrerie Blanche écrit une nouvelle page. Placé au cœur du projet, il est complété par une nouvelle extension. L’ensemble, récemment renommé « l’Usinerie », se développe sur 4 000 m² et devient un pôle régional dédié à la transformation digitale des entreprises industrielles avec des domaines d’expertises qui se spécialisent entre autres dans la réalité́ virtuelle et augmentée, l’intelligence artificielle, la robotique, la cybersécurité. Les espaces événementiels se trouvent au rez-de-chaussée tandis que les locaux d’enseignement sont abrités en étage. Quant aux plateaux techniques, ils trouvent leur place dans la nouvelle extension. Julien Leclercq nous raconte qu’à l’arrière de l’édifice il y avait plusieurs greffes et rajouts, des éléments résultants des phases et vies antérieures. Un patchwork de matériaux qui forme, selon l’architecte, un beau témoignage de la construction de l’époque. Le projet de rénovation s’inspire de cet univers et de cette esthétique. Il s’inscrit dans une volonté d’intervention minimale en préservant tout ce qui est possible. Notons également que tout au long du processus, les architectes ont croisé réhabilitation et réemploi et au risque de complexifier leur tâche, ils ont récupéré et recyclé tout ce qu’ils pouvaient réutiliser. La réhabilitation du Moulin de la Sucrerie Blanche puise sa force dans l’histoire, y ajoute sa propre écriture tout en regardant vers l’avenir.

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    Nous avons rencontré Philippe de Mareilhac, président de l’agence MV Design. L’agence d’architecture et de design de lieux est spécialisée dans la création d’espaces à relations fortes, pour des marques désirables et durables, dans le retail et l’hospitality. Philippe de Mareilhac perpétue ainsi l’expertise de son père, Alain, fondateur de l’agence en 1985, et disparu cet été. Le développement de MV Design repose actuellement sur trois piliers : la transformation du retail autour de la relation client, l’omnicanal, l’expérience et la RSE. la diversification vers des projets d’hospitality (bureaux, restauration, résidences services). le développement d’une expertise forte en matière d’économie circulaire et d’éco-conception afin d’aider ses clients retail et hospitality à innover. Ce troisième pilier étant fortement lié à la labellisation B Corp de l’agence, et au partenariat avec le collectif Génération Responsable. Nous avons demandé à Philippe de Mareilhac de partager avec nous sa vision sur le retail. NDA : Pour vous, quels sont les grands changements dans le secteur du retail depuis ces dernières années ? Qu’est-ce qui a totalement disparu ? Philippe de Mareilhac : J’identifie 5 grands changements : La transformation digitale qui continue. Après le click & collect, le web to store et le showrooming, la transformation continue via TikTok et le Live Shopping. Le magasin et les RS sont complémentaires et interdépendants. Les nouveaux usages pour une consommation plus responsable : seconde main, réparation, transition alimentaire, anti-gaspi… Les clients veulent continuer à consommer, mais différemment, et voient dans l’économie circulaire un modèle plus vertueux, et aussi plus économique (cf. les enjeux de pouvoir d’achat). On note le retour du commerçant avec l’importance donnée aux équipes pour créer du lien avec les clients, conseiller, accompagner. C’est le facteur X versus faire ses achats en ligne. Les magasins ne peuvent plus se limiter à être un lieu de stockage. Ils doivent plus que jamais incarner l’expérience de marque, et apporter du plaisir et de l’efficacité aux clients pour justifier le déplacement. Enfin le multi-format. Un réseau, ce n’est plus un concept déployé de manière industrielle et ultra normée sur des centaines de pdv. Un réseau doit être agile et protéiforme, avec des formats et des usages différents, des touches locales dans le design et l’offre produit, et une capacité forte à s’adapter au contexte concurrentiel de sa zone. Quant à ce qui a disparu, je reviens à mon cinquième point sur l’évolution d’un réseau. Avant, on était dans l’hyper industrialisation d’un concept, avec la volonté d’avoir une imagine hyper homogène et systématique partout. Et tous les 5 à 7 ans, on refaisait tout. C’est encore le cas dans beaucoup d’enseignes low cost où le prix est la raison de venue des clients. Pour le reste, les magasins sont devenus plus agiles et modulables en termes de formats, usages et design. Les actifs sont amenés à durer plus longtemps, et le retail staging (cousin du home staging) permet d’actualiser un concept sans tout refaire. De même, en termes de branding, le design est plus subtil et les marques créent des lieux résolument plus lifestyle, et non des boites « hyper brandés » comme dans les années 1980 à 2000. NDA : Quelles sont les tendances émergentes ? PDM : Il
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    Sous le chaume, une école publique

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    Dans la commune de Saint-Pabu, l’agence d’architecture Guinée*Potin a réalisé une école publique et une salle multi-activités qui adoptent le lieu et se distinguent par ses diverses qualités environnementales. Située à 27 km au nord de Brest, la commune de Saint-Pabu se trouve sur la rive gauche de l’embouchure de l’aber dénommé Aber Benoît. C’est dans un contexte urbain peu dense et un environnement rural très caractéristique que l’on découvre le projet de l’école publique. Cette dernière a pris place sur un premier plateau, au niveau de l’entrée sud de l’espace Roz Avel et de la cantine actuelle. Quant à la salle de sport, elle s’implante sur un second palier situé plus haut sur le coteau, tandis que le troisième plateau est dédié à une zone de stationnement existante et une réserve foncière de la Mairie. La différenciation des programmes était donc une évidence pour les architectes qui ont profité du jeu de décalage du site pour implanter avec soin leur projet. Il suit le tracé d’une allée piétonne transversale qui dessine une épine dorsale sur un axe nord / sud et articule les programmes nouveaux mais aussi les équipements existants. L’école et la salle multi-activités sont implantées dans un contexte qui garde son âme, mis en exergue à travers des cheminements, des traverses et des allées. Ce projet, ancré dans son milieu, exprime la signature de l’agence Guinée*Potin dont la démarche consiste à relier avec adresse architecture et contexte. Trois entités en une L’ensemble puise ses sources dans la localité où il se trouve. En effet, la réalisation réinterprète de façon contemporaine les aspects vernaculaires du site. « Le talus, présent sous différentes formes sur le site et ses alentours, est une figure paysagère caractéristique du lieu. Le projet conserve ces talus parallèles à la pente, les prolonge et en crée de nouveaux pour structurer le terrain en différents plateaux, sur lesquels viennent se glisser les bâtiments » raconte l’architecte Hervé Potin, associé de Guinée*Potin. De même, la réalisation reprend les caractéristiques d’architectures traditionnelles des Abers en Bretagne comme le recours à des bâtiments distincts, les pignons fermés protecteurs, les couvertures à doubles pentes et les toitures en chaume. L’école est composée de trois longères qui abritent chacune une entité programmatique distincte. Tandis que les locaux de la maternelle se trouvent au nord, l’administration, les locaux techniques et la salle de motricité commune à la maternelle et à l’élémentaire sont placés au centre. Quant aux locaux élémentaires, ils sont abrités dans la longère donnant vers le sud. L’entrée de l’école présente des façades fermées aux vents et à la pluie offrant un portique évidé pour accueillir le public. Elle se situe au niveau du parvis qui se compose d’un premier espace clôturé sécurisé et d’un second ouvert qui assure la continuité avec l’allée pavée de béton balayé par sa matérialité, s’ouvrant vers l’entrée côté sud et sur la mairie en contrebas. Un espace agrémenté d’un arbre et aménagé de quelques assises offre un cadre agréable aux accompagnants à la sortie des classes. À noter

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