Architecture un lieu

Un acteur incontournable du retail

Par Nat Lecuppre, le 3 mai 2024.
Image
DR

Nous avons rencontré Philippe de Mareilhac, président de l’agence MV Design. L’agence d’architecture et de design de lieux est spécialisée dans la création d’espaces à relations fortes, pour des marques désirables et durables, dans le retail et l’hospitality.

Philippe de Mareilhac perpétue ainsi l’expertise de son père, Alain, fondateur de l’agence en 1985, et disparu cet été.

Le développement de MV Design repose actuellement sur trois piliers :

  • la transformation du retail autour de la relation client, l’omnicanal, l’expérience et la RSE.
  • la diversification vers des projets d’hospitality (bureaux, restauration, résidences services).
  • le développement d’une expertise forte en matière d’économie circulaire et d’éco-conception afin d’aider ses clients retail et hospitality à innover. Ce troisième pilier étant fortement lié à la labellisation B Corp de l’agence, et au partenariat avec le collectif Génération Responsable.

Nous avons demandé à Philippe de Mareilhac de partager avec nous sa vision sur le retail.

NDA : Pour vous, quels sont les grands changements dans le secteur du retail depuis ces dernières années ? Qu’est-ce qui a totalement disparu ?

Philippe de Mareilhac : J’identifie 5 grands changements :

  1. La transformation digitale qui continue. Après le click & collect, le web to store et le showrooming, la transformation continue via TikTok et le Live Shopping. Le magasin et les RS sont complémentaires et interdépendants.
  2. Les nouveaux usages pour une consommation plus responsable : seconde main, réparation, transition alimentaire, anti-gaspi… Les clients veulent continuer à consommer, mais différemment, et voient dans l’économie circulaire un modèle plus vertueux, et aussi plus économique (cf. les enjeux de pouvoir d’achat).
  3. On note le retour du commerçant avec l’importance donnée aux équipes pour créer du lien avec les clients, conseiller, accompagner. C’est le facteur X versus faire ses achats en ligne.
  4. Les magasins ne peuvent plus se limiter à être un lieu de stockage. Ils doivent plus que jamais incarner l’expérience de marque, et apporter du plaisir et de l’efficacité aux clients pour justifier le déplacement.
  5. Enfin le multi-format. Un réseau, ce n’est plus un concept déployé de manière industrielle et ultra normée sur des centaines de pdv. Un réseau doit être agile et protéiforme, avec des formats et des usages différents, des touches locales dans le design et l’offre produit, et une capacité forte à s’adapter au contexte concurrentiel de sa zone.

Quant à ce qui a disparu, je reviens à mon cinquième point sur l’évolution d’un réseau. Avant, on était dans l’hyper industrialisation d’un concept, avec la volonté d’avoir une imagine hyper homogène et systématique partout. Et tous les 5 à 7 ans, on refaisait tout. C’est encore le cas dans beaucoup d’enseignes low cost où le prix est la raison de venue des clients.

Pour le reste, les magasins sont devenus plus agiles et modulables en termes de formats, usages et design. Les actifs sont amenés à durer plus longtemps, et le retail staging (cousin du home staging) permet d’actualiser un concept sans tout refaire.

De même, en termes de branding, le design est plus subtil et les marques créent des lieux résolument plus lifestyle, et non des boites « hyper brandés » comme dans les années 1980 à 2000.

NDA : Quelles sont les tendances émergentes ?

PDM : Il y a une tendance dont tout le monde parle, mais encore assez peu visible dans le design des boutiques : l’adaptation locale d’un point de vente.

Les retailers en ont très envie, les clients aussi, mais dans les faits les réseaux sont encore très centralisés, à part dans l’alimentaire où c’est vraiment dans l’ADN des groupes d’indépendants (Leclerc, Système U, Intermarché) et où la logique des achats locaux a pris du poids.

Ou alors il faut aller dans le luxe, et là les moyens sont tels que la prise en compte de la culture locale fait partie du travail d’architecture et de design de certaines boutiques.

Autre tendance : l’éco-conception des points de vente. La crise énergétique a fait bouger les lignes. Sur les matériaux, c’est plus compliqué, car la règlementation est trop contraignante. Sur le réemploi, ça se développe de plus en plus car, comme ailleurs, on cherche à allonger la durée de vie des actifs, et donc à limiter les capex.

NDA : Comment voyez-vous le commerce de demain ?

PDM : Si on parle des boutiques, alors je les imagine de plus en plus humaines et relationnelles. C’est dans la définition même du mot « commerce ». Demain, on viendra de moins en moins dans un magasin pour acheter un produit neuf. On viendra pour trouver un équivalent en seconde main moins cher, pour louer, faire réparer un produit, ou pour des services innovants… Pour tout cela, on aura besoin d’accompagnement et de conseil, à l’inverse du commerce digital efficace et facile, mais très automatisé.

J’imagine aussi de plus en plus de magasins ateliers / ouvriers, showroom du savoir-faire, avec de la fabrication sur place, des ateliers pour apprendre, se développer, où la communauté se retrouve et échange. Les clients s’approprieront le magasin pour le faire vivre. Nous serons très loin du modèle du magasin-entrepôt qui déborde de produits à vendre en self-service.

Enfin, si on parle des malls, je les imagine de plus en plus végétalisés et paysagés.

Idéalement, des gardens malls où la végétation recolonise une partie de la surface construite. Le mouvement a commencé sur les parkings et un peu à l’intérieur. Mais il faut aller beaucoup plus loin, en cassant les grosses boites climatisées et éclairées artificiellement que nous avons actuellement. On doit en faire de véritables jardins. La balade et le bien-être doivent être les deux fondements pour concevoir autrement un centre commercial.

Merci à Philippe de Mareilhac pour ce partage d’expertise.

Partagez cet article autour de vous
Facebook
Twitter / X
LinkedIn
Pinterest
E-mail

MV Design

89, rue de Monceau

75008 Paris

Tél. : +33 (0)1 47 61 87 02

www.mv-design.fr

Retrouvez cet article dans le nda numéro 55
Image

Je Vœux…

Commander

À découvrir
Image
Urbanisme

Alki, une belle assise basque

Par Anne-Marie Fèvre, le 11 mars 2024
Engagée depuis 1981 à Itsasu, l’entreprise de meubles a muté vers un beau design élémentaire. Avec le nouvel atelier architectural bâti à Larressore, elle entend développer sa croissance, ses valeurs humaines et écologiques. Océan vigoureux à Biarritz, maisons blanches aux volets rouges, campagne vallonée d’un vert rassurant, le nom d’Espelette d’un village, l’« euskara » langue si affirmée… Pas de doute, nous sommes au Pays basque français, dans la province du Labourd. Il y a là tous les piments d’une carte postale très prisée. Trop ? Ce « pays » se vit sous une tension due à un trop-plein de touristes1. Mais le village d’Itsasu (Itxassou), connu pour ses cerises noires, son site du Pas de Roland (de Roncevaux) résiste. C’est là que l’entreprise Alki de meubles s’est consolidée, elle s’apprête à muter encore en implantant un atelier contemporain à Larressore. Longtemps, « basque » a aussi rimé avec un style de meubles traditionnels, robustes, ornementés, en chêne et noyer, dont le manka (buffet) et le zuzulu (banc-coffre). C’est en s’appuyant sur ces savoir-faire patrimoniaux, mais surtout pour dynamiser ce territoire rural peu industrialisé, que cinq amis ont créé en 1981 la coopérative Alki, qui signifie « chaise ». Elle se tourne naturellement vers la fabrication de mobilier en chêne massif, crée rapidement de l’emploi avec des assises qui portent la volonté militante « de vivre et travailler au Pays basque ». Ce statut original de coopérative permet une gouvernance démocratique. « Mais il a fallu vaincre bien des difficultés, raconte Eñaut Jolimon de Haraneder, jeune PDG d’Alki depuis 2020, il a remplacé le co-fondateur Peio Uhalde. Un incendie de l’atelier en 1984, le déclin du meuble rustique basque… Nous devions nous reconvertir pour survivre. » C’est chose engagée en 2005. Le designer industriel Jean-Louis Iratzoki est recruté comme directeur artistique pour créer une marque plus contemporaine grâce au design, conquérir un nouveau marché. Nait en 2007 Emea, un siège ligne claire mais costaud, un succès durable. En 2015 est conçue la collection Kuskoa Bi, chaise en bioplastique. De nouvelles pièces sont élaborées avec les designers Samuel Accoceberry et Patrick Norguet. En 2021, Alki ouvre son premier showroom à Paris. Ainsi, en 2022, la marque produit des sièges, tables et bureaux, soit plus de 20 collections, au milieu du haut de gamme. Qui sont destinées au marché des cafés, de l’hôtellerie, de la restauration ; aux boutiques (retail) ; et aux espaces d’accueil du public, musées, mairies, universités. Avec 42 coopérateurs, et un chiffre d’affaires de 7,4 millions d’euros, qui se répartit à 70 % pour la France et à 30 % à l’export, en Europe et Amérique du Nord. À la Milan Design Week d’avril 2023, Alki a célébré une pièce d’exception, la version grand public de la chaise Orria, conçue par le designer français Patrick Jouin pour la salle ovale de la BnF Richelieu, une belle histoire (lire Nda n° 52). Ont été également dévoilées les nouvelles propositions du studio Iratzoki & Lizaso, dont le siège Xume (simple). Lors de sa présentation parisienne du 13 juin, le designer Ander Lizaso de San Sebastian (Espagne), en osmose avec
Image
Architecture, l'esprit du lieu

Immersion totale en Colombie

Par Nat Lecuppre, le 26 février 2025
L’agence d’architecture Archipelles vous transporte en Colombie avec Bazurto, un restaurant colombien à Paris. Pour son concept architectural, Hélène Paoli, fondatrice de l’agence Archipelles, s’est inspirée d’un lieu mythique de Carthagène, le Bazurto, appelé par le chef Juan Arbelaez « El Mercado Loco », un marché populaire et complètement « fou » qui réunit toutes sortes de produits, d’odeurs et de musiques. Comme le marché, le restaurant présente cette ambiance festive et animée. La musique se marie à la cuisine, la danse, les fruits et légumes colorés, et incarne la personnalité pleine de vie du chef. Les lieux se répartissent sur deux niveaux. Au rez-de-chaussée, on se retrouve au cœur de la vieille ville où l’on mange sur le pouce et prend un cocktail au bar dans un cadre jovial et carnavalesque. À l’étage, on prend place autour d’une table en marbre rouge pour savourer une cuisine expérientielle au feu de bois. L’ambiance est chaleureuse et prend des airs d’hacienda. Fête et vins d’exception célèbrent la gastronomie colombienne. Pour la décoration intérieure, l’architecte a pris le parti de mettre la Colombie et ses traditions au cœur du projet. Le mobilier est créé en fil de scoubidou, les murs sont de couleur ocre et les tomettes en terre cuite. Un ciel de pompons colorés rappelle le pays et ses teintes chatoyantes. Geste caritatif sous l’égide d’Artefaktos, qui promeut l’artisanat et l’art colombien en France : chacun de ces pompons, fabriqués par la communauté colombienne de Paris, permet de reverser une somme à une association. Une fresque de l’artiste colombienne Alexandra Arango anime les lieux. Les murs sont signés de l’équipe de Caroline Perrin AC Matiers. Une attention particulière est portée à la lumière afin de créer différentes ambiances selon les heures de la journée. Le soir, au rez-de-chaussée, l’ambiance est à la fête. À l’étage, l’atmosphère est davantage celle d’un hôtel particulier du centre de Carthagène. On trouve au sol un damier vert et crème, de la fibre de bananier aux murs, des plantes et des tissus colorés… L’espace est chaleureux et élégant. Face à la cuisine, le chef Juan Arbelaez accueille à sa table les passionnés culinaires. Il leur propose une immersion sensorielle dans « son antre ». On découvre même ses souvenirs au travers de photos et de bibelots. Au Bazurto, le dépaysement est assuré. Adresse à retenir pour une belle soirée festive en perspective !
Image
Architecture, l'esprit du lieu

Une seconde vie pour les assises vintage

Par Nat Lecuppre, le 25 mars 2025
Clémence Miray et Manon Dessirier-Bourges incarnent les valeurs actuelles recherchées dans les projets d’intérieur. Elles ont créé leur jeune entreprise Chaise au Carré après le confinement. Chaise au Carré donne une seconde vie aux assises vintage qui sont chinées puis personnalisées. Dans une démarche d’économie circulaire, Chaise au Carré permet de réduire la surconsommation mais aussi l’empreinte carbone. Elle est une alternative à l’achat de mobilier neuf. Les garanties sont les mêmes et la durée de vie prolongée. Deux talents complémentaires. Clémence Miray est spécialiste en tapisserie et Manon Dessirier-Bourges en matériaux et bois. Elles rénovent chaque pièce avec minutie à tel point que les chaises semblent neuves lorsque vous les recevez. Les matières premières sont privilégiées (cuir déclassé de grandes maisons, fins de rouleaux de tissus…). Les assises procurent le même confort qu’elles soient destinées au bureau ou à la maison. Chaise au Carré fournit une réponse écoresponsable pour les espaces de travail. La start-up accompagne dans leurs projets les architectes, maîtres d’ouvrage, designers… en leur proposant jusqu’à 250 pièces chinées, restaurées voire transformées. Leur travail tient compte du bien-être au travail, du développement durable, de la flexibilité, de la modularité, de la qualité et de l’esthétisme. Chaise au Carré est partenaire d’Interface, Saguez & Partners, Bluedigo, Deskeo, Edgar Suites… L’entreprise a livré des assises pour AFP, AXA, la Caisse des Dépôts, Sanofi… Elle a aussi signé des projets d’hôtels, de restaurants et de résidences. Chaise au Carré accompagne également les particuliers dans leurs projets. L’entreprise les conseille pour leur sélection des assises et créer des intérieurs avec de la personnalité et élégance. Elle conjugue formes et matières. Une start-up engagée. L’engagement social tient à cœur Clémence et Manon. Elles collaborent avec des ESAT et avec PAM (Pantin Activités et Métiers) pour des travaux de couture. La réinsertion professionnelle est un enjeu de société. Il s’agit de valoriser le savoir-faire et d’intégrer dans leur projet professionnel les personnes de ces organismes. Un positionnement environnemental fort Chaise au Carré est labellisée Eco Impact. Elle obtient une note de A pour l’impact environnemental, et une note de B pour l’impact social avec une fabrication 100 % française, une démarche sociale engagée ainsi qu’une démarche RSE active. Chaise au Carré vous assure une expertise et un savoir-faire exceptionnels. À vos côtés, elle est un atout précieux pour tous vos projets.

Laisser un commentaire

14 + quatre =