Architecture remarquable

Domaine UMA, une chorégraphie au cœur des vignes

Par Nat Lecuppre, le 6 décembre 2024.
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C’est un morceau de paysage à la beauté ingénue où se croisent les vignes et les garrigues et qui a servi de décor à une scénographie hors pair. Menée avec la plus grande habileté, attirant les regards mais aussi l’attention, cette dernière porte la gracieuse signature de l’Agence Clausel-Borel.

Un lieu paradisiaque faisant face aux montagnes de l’Hortus et du Pic Saint-Loup mais aussi au château de Montferrand et à la chapelle d’Aleyrac, ancienne carrière d’où sont issues les pierres du projet, des terres à la lumière abondante, un écrin bucolique qui a servi de toile de fond pour une chorégraphie au sein d’un domaine appelé UMA. La parcelle est atypique, nous y trouvons des constructions minimalistes, en pierres massives très caractéristiques de la région, résultant de la première destination du bâti qui était jadis une ancienne magnanerie, une construction destinée à l’élevage des vers à soie, datant de la fin du XIXe siècle. L’ensemble qui a été transformé et divisé au cours de son histoire en deux domaines vinicoles, le Château Cambon et le Domaine de Valcyre, permet d’ouvrir les bâtiments sur deux cours protégées du vent grâce à son plan en forme de double U. Aujourd’hui, UMA résulte de la fusion des deux vignobles ancestraux et aspire à ouvrir un autre chapitre pour écrire une nouvelle histoire. L’Agence Clausel Borel (Florence Clausel-Borel), établie à Paris et à Montpellier, a été mandatée pour mener à bien un projet complexe situé sur des terres d’une rare beauté, rachetées il y a deux ans par l’actuel propriétaire. L’opération consistait en la restructuration de la partie agricole comprenant les chais de vinification et d’élevage, des laboratoires et locaux techniques, ainsi que la construction d’un nouveau bâtiment agricole qui répondra aux cahiers des charges afin d’augmenter la capacité agricole. À cela s’ajoute un gros travail de paysage pour mieux définir les différentes voies d’accès et revoir tous les abords du domaine. Pour cela, les architectes ont travaillé en collaboration étroite avec les paysagistes d’ALEP (Ateliers Lieux Et Paysages), rompus à ce genre d’exercice. La volonté des architectes était, dès le départ, l’inscription dans l’existant. Pas de geste ostentatoire, pas de forme qui dénote mais une architecture à petites doses, délicate et intemporelle qui magnifie le « déjà là » tout en apportant une touche originale sans délaisser le côté technique indispensable dans un pareil programme. Le chai se trouve au sein du deuxième U de la bâtisse et se caractérise par une grande porte d’entrée ; le visiteur y accède à travers une cour minérale adaptée pour la réception des vendanges et la mise en bouteilles du vin. Souhaitant garder l’atmosphère authentique du lieu, l’ensemble des murs, qui dans le passé avaient été enduit de béton, a été rénové et mis en évidence. C’est ainsi que la pierre d’origine de plus de 200 ans recouverte de ciment se révèle sous ses plus beaux atours. L’architecte Florence Clausel-Borel souligne que l’architecture fait écho au vin biologique et sans artifices fabriqué dans ces lieux.

Authenticité, technicité et sensibilité.

Dans leur geste architectural sensible, les architectes ont créé une expérience quasi scénographique, où le chai tout en gardant sa technicité devient un espace de mise en scène pour la préparation du vin. L’un des points forts visibles du projet réside en son escalier hélicoïdal sculptural, situé face à l’entrée des acteurs du chai et entretenant la liaison entre la scène du rez-de-chaussée et les diverses passerelles rythmant l’espace. Quant aux multiples cuves, elles sont réparties autour de cet escalier central qui attire les regards. L’espace de dégustation du vin se trouve à l’étage, il s’agit d’une pièce suspendue qui offre une vue sur le spectacle du chai mais aussi un cadrage cinétique par une grande ouverture en arc de cercle sur le Pic Saint-Loup et l’Hortus. Tout à côté, une terrasse offre de belles perspectives sur les environs. L’ensemble ressemble à une remarquable chorégraphie menée de main de maître inspirant une architecture de qualité en réponse aux différentes exigences du site. Ces dernières, qu’elles soient esthétiques ou techniques, ont été traitées avec la plus grande précaution pour un résultat remarquable. Au niveau inférieur, le chai de vinification et l’ancien chai devenu aujourd’hui chai d’élevage communiquent via une percée visuelle. C’est ici, dans cet antre aussi sacré que secret à la température équilibrée que se trouvent les tonneaux et cuves ovoïdes en béton et où s’opère la production des précieuses bouteilles du domaine. Tandis que les espaces techniques, véritables coulisses du chai qui renferment les nombreux outils nécessaires au processus de vinification, sont dissimulés derrière les cuves auto-réfrigérées du chai de vinification. Il s’agit d’interstices accessibles sous forme d’une galerie furtive montrant, pour les plus curieux, l’envers du décor. Côté matériaux, un savant croisement s’opère entre la pierre naturelle, le bois, l’inox teinté dans des camaïeux de cuivres mais aussi le Corten, le tout mis en exergue grâce à un subtil éclairage intérieur mettant l’accent autant que possible sur les matérialités et les textures. Ainsi, chaque vue est remarquée, chaque modénature est soulignée, chaque teinte est rehaussée et chaque détail est distingué. Quant à la perspective depuis la salle de dégustation vers le laboratoire, elle est accentuée grâce à un éclairage rasant, situé dans des gorges au droit des murs latéraux, cela concentre le regard des visiteurs vers l’origine du process de vinification. À cela s’ajoute le travail de mise en lumière composée de lignes suspendues, formant une ondulation évanescente depuis l’escalier central vers le laboratoire. À chaque temporalité correspond une variation de couleurs allant d’un éclairage technique vers un éclairage décoratif coloré qui rythme l’espace. Pour accomplir ce travail fin, les architectes ont fait appel à Concepto, véritable encyclopédie dans le savoir-faire des stratégies d’éclairage et habituée à travailler sur des projets de toute échelle en France et dans le monde. Rappelons également que l’architecte d’intérieur Margaux Lefèvre a été en charge des différents échanges avec les entreprises. Concernant la partie technique du projet, les architectes ont eu recours à l’ingénieur process Stéphane Bonnet. « Dans cette rénovation, nous avions un faux plafond avec une structure en plaques blanches pas très belles, il faut l’avouer, et nous avons cherché quelque chose qui donne véritablement plus de cachet au lieu. Nous avons choisi les panneaux à lames de bois Laudescher avec une finition chêne. Afin de renforcer l’harmonie de l’ensemble, nous avons utilisé la finition Wax Color Chêne aussi sur les poutres qui étaient plus claires. Le choix de cette teinte chêne est important, car c’est un rappel du chêne Kermès que l’on trouve dans les garrigues environnantes, comme un prolongement du paysage. C’est d’ailleurs l’essence du projet », souligne Florence Clausel-Borel. De ce fait, entourés d’une équipe de connaisseurs, les architectes ont pu répondre de la manière la plus concise et complète possible aux divers aléas du site. L’architecture intérieure n’en demeure pas moins importante ; en effet, le duo qui maîtrise également le pan de ce métier a suivi le chantier du gros œuvre jusqu’au dernier petit détail. C’est un projet complet que l’agence est fière d’afficher. Néanmoins, dans la restructuration du Domaine UMA, le travail de Clausel-Borel n’est pas terminé, l’agence a été également mandatée pour continuer ce surprenant travail entamé, il reste plusieurs interventions à développer, des prestations qui contribuent à améliorer la demande des clients pour que le lieu devienne une destination œnotouristique d’exception.

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    Domaine UMA

    Route de la Chapelle d’Aleyrac,

    34270 Valflaunès

    Tél. : +33 (0)6 14 43 41 76

    www.domaine-uma.com

    Agence Clausel-Borel architecte dplg

    2, passage des Entrepreneurs

    75015 Paris

    Tél. : +33 (0)1 42 77 04 82

    www.agence-clausel-borel.squarespace.com

    Ateliers Lieux Et Paysages

    La Glaneuse, avenue Philippe-de-Girard

    84160 Cadenet

    Tél. : +33 (0)4 90 68 88 84

    www.alep-paysage.com

    Concepto

    17, avenue Jeanne-d’Arc

    94110 Arcueil

    Tél. : +33 (0)1 47 35 06 74

    www.concepto.fr

    Detik

    Mœ EXE (hors process)

    1, rue Darius-Milhaud

    13105 Mimet

    www.logik.pro

    Laudescher

    (Faux plafond)

    14, rue Marcel-Laudescher

    50500 Carentan-les-Marais

    Tél. : +33 (0)2 33 42 09 52

    www.laudescher.com

    Defranceschi

    (Cuves, escalier métallique et passerelles)

    Via Selice, 9

    40027 Mordano BO

    Italie

    www.defranceschi.sacmi.it /

    Keim

    (Traitement des murs en pierre)

    ZAC du Dauphiné

    55, chemin de Mûre

    69780 Saint-Pierre-de-Chandieu

    www.keim.com

    Retrouvez cet article dans le nda numéro 57
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    Les belles demeures ont toujours le vent en poupe

    Par Nat Lecuppre, le 20 janvier 2025
    D’après une étude OpinionWay menée fin avril-début mai 2024 auprès de 421 répondants (Belles Demeures) ayant un projet d’acquisition ou de vente d’un bien de prestige d’ici deux ans, on peut confirmer que l’immobilier de luxe ou de l’ultra-luxe séduit toujours autant. Belles Demeures, filiale du Groupe SeLoger, est spécialiste de l’immobilier de prestige. Près de 500 000 annonces de biens d’exception sont mises sur leur site qui compte environ 700 000 visiteurs par mois. Malgré un contexte économique difficile, le luxe séduit toujours autant en France. Le marché immobilier du luxe français connaît une croissance de 2,3 % pour les maisons et 1,1 % pour les appartements en moyenne par an. A contrario du marché traditionnel où les maisons marquent une baisse de 1 % pour les maisons et 3 % pour les appartements. Ceci peut s’expliquer par le faible impact de la hausse des taux d’intérêt qui ne concerne pas véritablement la clientèle premium. À Paris, cette différence entre le marché traditionnel et le marché du luxe se ressent. En deux ans, les biens « classiques » ont vu baisser leurs prix de 12 % avec un tarif de 10 000 € / m2. Tandis que les appartements de luxe augmentent de 2,5 % pour un prix médian de 17 441 € / m2 soit environ 1,7 million d’euros, allant même jusqu’à 4,2 millions d’euros pour l’ultra-luxe. Rive gauche, des arrondissements comme dans le 7e enregistrent un prix médian de 3,9 millions d’euros soit + 5 % sur deux ans, + 2,1 % dans le 6e, + 1,9 % dans le 16e. Ce dernier détient 30 % des offres du marché de l’ultra-luxe parisien pour un prix médian de 4,7 millions d’euros. En 2023, Knight Franck réalise une année positive pour l’utra-luxe avec des transactions à Paris entre 50 M€ et 80 M€ (prix moyen 30 400 € / m2). 42 % des ventes concernent les hôtels particuliers, 75 % des ventes pour les biens avec espaces extérieurs, et 56 % des ventes pour les clés en main (« turnkey properties »). Les acheteurs sont majoritairement asiatiques et américains. Ces informations sont confirmées par Sébastien Kuperfis, président de Junot Fine Properties – Knight Frank. On pourrait se dire que tout va bien. Il n’en est pas de même pour les maisons luxueuses d’Île-de-France (Yvelines et Hauts-de-Seine). Leur prix médian de 1,3 ou 1,4 M€ notent une baisse de 5,1 % et 3,2 % sur un an. Seul Neuilly-sur-Seine avec ses hôtels particuliers propose un prix médian de 5,7 M€. Pourquoi cette dissonance avec la ville de Paris ? En fait, les acheteurs pour une maison de luxe en Île-de-France sont français, et souvent ils doivent demander un crédit pour acheter un bien. La multiplication par deux des taux d’intérêt en deux ans est donc le critère qui fait chuter les ventes. Confirmation de Thomas Lefebvre, vice-président Data chez Belles Demeures. L’immobilier de prestige a encore de beaux jours devant lui, surtout en région. Les territoires les plus dynamiques sont la Côte d’Azur (départements 06, 83, 13) avec les maisons luxueuses les plus chères de France, la côte ouest face à l’Atlantique (départements 64, 40, 33, 17, 85 et 44) et en Normandie (départements 14 et 76). La Provence a connu des prix de + 7,2 % en un an, et les Alpes (départements 73,
    Un éclairage subtil, plus fidèle à celui de 1932.
    L'événement

    Son nom de Grand Rex en or

    Par Anne-Marie Fèvre, le 1 avril 2024
    Du blanc, du noir et du doré comme en 1932 ! Avec sa façade réinterprétée, le mythique cinéma Art déco parisien retrouve subtilité et luminosité. Visite éclairante avec l’architecte Grichka Martinetti. Pour les Parisiens de toutes générations, c’est une énorme madeleine en staff et étoiles où ils ont croqué films et spectacles enchanteurs. C’est le Grand Rex ! En flânant sur les Grands Boulevards, on a pu constater que ce palais du IIe arrondissement, tout dédié au cinéma depuis 1932, a été embelli en décembre 2022, il fêtait ses 90 ans. « Mon client, c’est le bâtiment », affirme l’architecte Grichka Martinetti 1, qui a été chargé avec Stéphane Thomasson 2 de la mue extérieure du temple Art déco. Bien sûr, il a œuvré pour Alexandre Hellmann, directeur général de ce complexe de cinéma-divertissement-culture et avec l’équipe du Rex. « Nous ne sommes intervenus que sur la façade, précise -t-il, et nous avons assuré l’étanchéité déficiente des toitures. » Au départ en 2020, il n’était question que d’un ravalement. Frustrant. Mais comme la façade a été inscrite aux Monuments historiques par Jack Lang en 1981, il a fallu jouer entre la Drac qui avait son petit mot à dire et un projet privé. Devant ce patrimoine du XXe siècle, un « syncrétisme » maintes fois retouché dans les années 50, 70, bien trahi dans les années 80, les architectes se sont d’abord interrogés. Est arrivé le Covid. « Nous avons profité de cet arrêt de notre travail pour faire un diagnostic, explique Grichka Martinetti, pour mener une étude patrimoniale. Nous avons consulté les nombreuses archives numériques des années 20 et 30, 50, en 70. Il y a beaucoup de photos du Rex, des documents noir et blanc, puis en couleur à partir de 1941. » Grichka, qui a vu là les films Disney dans son enfance, s’est plongé avec délectation dans une enquête. Dans l’histoire. Dans les Années folles de 1926, l’irrup­tion du cinéma sonore et parlant entraîne la construction ou la mutations de théâtres en cinémas, tel le Gaumont Palace à Paris (détruit en 1973). C’est alors que Jacques Haïk, ancien distributeur de Charlot dont il a inventé le nom, importateur de films américains, propriétaire du Colisée et de l’Olympia, envisage de créer l’un des cinémas les plus grands et les plus innovants d’Europe à Paris. Il en confie l’édification à l’architecte français Auguste Bluysen, un styliste Belle Époque, auteur des deux tours de la biscuiterie LU à Nantes en 1909 et du casino du Touquet. Et tourné vers l’Amérique, il fait aussi appel à l’Américain John Eberson, auteur du Majestic Theatre à Houston (1923) qui illustre en premier son concept de salle « atmosphérique ». Ils vont s’inspirer du Radio City Music Hall de New York. En construisant, ces deux bâtisseurs vont synthétiser une architecture à la fois rationnelle et très décorée, avec des éléments navals et médiévaux, en donnant une place prépondérante à la lumière. Structure en acier, charpente remplie de briques, éléments de béton coulé se mêlent aux fresques et aux ornementations. Ils inventent la modernité Art déco en France, le
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    Asaya Spa by Guerlain le nouvel écrin du bien-être

    Par Sipane Hoh, le 6 janvier 2025
    C’est au sein du prestigieux Rosewood São Paulo que nous pouvons découvrir la dernière réalisation du créateur Philippe Starck. Il s’agit d’Asaya Spa by Guerlain, un lieu singulier qui offre des solutions créatives pour le bien-être personnel dans un univers teinté de luxe. Rosewood São Paulo occupe l’ancien hôpital Matarazzo Maternity, ainsi que l’étonnante tour-jardin verticale portant la griffe de l’architecte Jean Nouvel. Dans cette ville considérée comme l’une des plus peuplées au monde, Asaya Spa by Guerlain constitue une retraite singulière pour répondre à tous les besoins de sa clientèle. Dès l’entrée du Spa, les visiteurs sont immergés dans un monde unique qui rend hommage à l’artisanat brésilien. Des meubles d’origine locale accueillent ainsi des usagers enthousiastes, médusés par les nouvelles propositions. Les œuvres d’art soigneusement sélectionnées, dont une œuvre majestueuse signée de Fabiano Senk, peintre basé à São Paulo, complètent la sélection. Le lieu comprend sept salles de soins, un studio de remise en forme ultramoderne, un sauna et un hammam accompagnés de leurs vestiaires équipés. L’espace dédié à la remise en forme est composée à son tour de différentes pièces dédiées aux activités privées mais aussi collectives, comme les zones consacrées au yoga, au Pilates et à la guérison par le son. La Crystal Room constitue un espace exceptionnel, visuellement salutaire et vivifiant quant à son agencement mettant en avant une multitude de miroirs et des cristaux d’origine brésilienne. L’établissement honore la culture locale, favorise la durabilité, propose une gestion responsable des déchets et de l’eau tout en s’approvisionnant en matériaux ayant une empreinte carbone minimale. Asaya Spa by Guerlain est la destination qui joint l’utile à l’agréable !

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