Architecture un lieu

Un écrin d’excellence à Cognac

Par Nat Lecuppre, le 15 mars 2024.
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© Redman Wilmotte Associes Architectes

Cognac, ville éponyme du célèbre spiritueux connu dans le monde entier et devenu en 1936 une Appellation d’origine contrôlée, a lancé en 2021 un appel à candidatures pour réaliser le futur siège social de la filière Cognac.

Le BNIC (Bureau national interprofessionnel du cognac) a consulté treize équipes d’architectes associés à des promoteurs. Le projet retenu est celui du groupement : REDMAN, Wilmotte & Associés Architectes, A40 Architectes et Sempervirens.

Plusieurs enjeux

Le futur siège social sera constitué de trois bâtiments. Il aura pour objectif de devenir un lieu de collaboration, d’échanges et d’innovations. L’écriture architecturale est sobre et élégante. Le site est en plein cœur de ville, au bord du fleuve Charente. Le terrain arboré de 8 000 m2 a un positionnement urbain et paysager.

Le premier enjeu est de rendre attractif le site, de faire rayonner la filière mais aussi le territoire. Une centaine de collaborateurs du BNIC seront accueillis ainsi que les syndicats de la viticulture et du négoce cognaçais.

Ce projet reprend l’histoire de ce patrimoine et écrit une nouvelle page qui le plongera dans le futur. La construction du site se conjugue avec la transformation de la ville de Cognac. Elle va faire renaître les quais et ouvrir Cognac sur le fleuve Charente. Avec son architecture, elle aura un rayonnement national et international. Alexandre Gabriel vice-président du BNIC précise : « Ce projet fait référence à nos origines, à cette région dans laquelle Cognac est si profondément enraciné et qui a su se projeter dans le monde entier. »

Une architecture singulière

L’ouverture sur la ville et sur le paysage environnant sont les mots d’ordre du concept architectural. De grandes baies vitrées à travers les bâtiments apportent de la transparence et accentuent la qualité de vie au travail. Les utilisateurs bénéficient d’une vue sur la nature. Comme les fermes charentaises, le parti pris architectural opte pour trois bâtiments au lieu d’un seul et unique volume. Une passerelle les relie.

La nature prend place dans le projet. L’implantation des bâtiments crée une grande cour plantée de tilleuls octogénaires existants et préservés.

Les moindres détails sont pensés. On retrouve l’identité de l’appellation avec les engravures. Les matériaux sélectionnés sont représentatifs de la région et de l’univers du Cognac. Dans le jardin, on découvre un jeu sur les crus du Cognac. Les quatre éléments de fabrication du spiritueux qui tenaient à cœur du président du BNIC, à savoir l’eau, la terre, la roche et le feu de la distillation se retrouvent dans le paysage créé par Sempervirens.

Une ambition durable

La transition environnementale compte pour la filière du cognac, qui a une politique de recherche et développement très engagée. La filière se projette avec ce site et pense aux enjeux de demain. Les lieux seront tournés vers l’avenir. Les espaces répondront aux nouveaux modes de travail et aux diverses attentes. On trouvera du flex office, des espaces collaboratifs, des équipements technologiques dernière génération, des espaces de réception et de formation interactifs. Le bien-être au travail est pris en compte. Des espaces seront dédiés aux personnes et institutions qui collaborent avec l’interprofession sur des sujets scientifiques. Des experts seront également accueillis. Un lieu de recherche sera constitué d’un laboratoire, d’un lieu d’accueil et de formation.

Croissance, qualité et compétitivité

La protection de l’environnement tient une place importante au sein de la filière. Une attention particulière est portée sur l’adaptation au changement climatique, la sobriété et le gain d’efficacité énergétique dans les chaînes de valeur, le développement de nouvelles variétés de vignes résistantes aux maladies. Il s’agit d’améliorer sans cesse les moyens scientifiques et techniques (qualité et sécurité des process, défense des produits AOC, protection du consommateur…). Les formations assureront la transmission d’un savoir-faire et des connaissances.

Des atouts : ses contraintes !

Les éléments existants à la prise en compte des risques d’inondation sont intégrés dans le projet. Le rez-de-chaussée des bâtiments est surélevé par rapport à la ligne de crue de la Charente. Les parties ouest sont réaménagées en jardin limitant les emprises du bâti. Ainsi lors d’inondation, le site continue à fonctionner. L’eau est omniprésente dans le paysage imaginé par l’agence Sempervirens.

On retrouve la terre et la roche dans les diverses implantations de petits salons de jardin associés aux six terroirs qui constituent l’appellation (Grande Champagne, Petite Champagne, Borderies, Pins Bois, Bons Bois et Bois Ordinaires. Leur aménagement reprend leurs sols avec un béton de terre qui reconstitue leur composition et coloris.

Des plans d’eau paysagers au sud et à l’ouest du bâtiment principal incarnent l’eau et le feu avec le soleil s’y reflétant. Un clin d’œil au feu de la distillation, de la tonnellerie et de la chaudronnerie. La lumière illuminera les espaces intérieurs.

La réalisation de ce projet éco-responsable vise 4 certifications et labels (HQE Bâtiment Durable, Label Produit Biosourcé, Osmoz et E+C-).

La date d’inauguration de ce siège social est estimée pour 2025.

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    BNIC

    23, allées Bernard-Guionnet

    16100 Cognac

    Tél. : +33 (0)5 45 35 60 00

    www.cognac.fr

    REDMAN

    126, rue de Provence

    75008 Paris

    Tél. : +33 (0)1 40 69 04 25

    www.redman.fr

    Wilmotte & Associés Architectes

    68, rue du Faubourg Saint-Antoine

    75012 Paris

    Tél. : +33 (0)1 53 02 22 22

    www.wilmotte.com

    A40 Architectes

    56, rue Paul Camelle

    33000 Bordeaux

    Tél. : +33(0) 5 56 74 02 11

    www.a40architectes.com

    Sempervirens

    95, rue de Vaugirard

    75006 Paris

    Tél. : +33 (0)1 42 22 37 70

    www.sempervirens.fr

    Retrouvez cet article dans le nda numéro 54
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    Egeo, label hellène de restauration

    Par Lionel Blaisse, le 12 août 2024
    Plus que de l’espace ! Telle est la signature de l’agence Masquespacio sollicitée par la jeune chaîne de restaurants de  souvlakis Egeo pour implanter son troisième établissement à Valencia, après Madrid. Cruel dilemme pour Christophe Penasse et Ana Milena Hernandez Palacios, les concepteurs, de devoir restreindre leur créativité dans leur propre ville, où leurs nombreuses interventions plutôt décoiffantes dans la restauration ont concouru à leur renommée internationale. En effet, leur commanditaire ne souhaitait pas ici trop s’éloigner de l’ambiance de ses deux premières adresses madrilènes. (Ac)cueillir les clients. Un immeuble Art déco parfaitement symétrique de cinq étages dans l’Eixample valencien dont l’enduit vert olive est souligné par le blanc des éléments de modénature. Porte d’entrée centrale pour accéder aux étages, encadrée de deux étroites vitrines précédant les deux baies libres latérales commandant chacune un restaurant : un scandinave à gauche, un grec à droite. Un grand linteau blanc reposant sur une corniche oblongue signale le second, dont le seuil constitue un sas bicolore en partie ouvert. Adossées aux parois immaculées, des banquettes maçonnées y tiennent lieu d’assises agrémentées de coussins tandis qu’émergent de la résine outremer du sol quatre guéridons. Un longitudinal vitrage enchâssé dans une volute de staff et une large porte géométriquement vitrée à galandage – tous deux sertis d’une menuiserie bleue – donnent à voir la salle de restaurant. Blancheur éthérée et Klein d’œil. Deux couleurs emblématiques caractérisent l’architecture vernaculaire des Cyclades. Les enduits à la chaux crépissent d’un monochrome blanc rafraichissant les maçonneries aux morphologies simples des constructions insulaires, à l’exception de l’outremer des menuiseries extérieures et des quelques toitures dérogeant à la terrasse. Le concept de Masquespacio se délecte de cette dichotomie chromatique à laquelle s’ajoute le bois brut des plateaux de tables, des tablettes murales et des archaïques tabourets. Plafonds, murs, cloisons, appliques, table d’hôtes, banquettes, dosserets et sol se fondent en une enveloppe immaculée que nuancent d’ombres portées les reliefs, les courbes et les niches. Une grande verrière rétro-éclairée plombe de lumière l’arrière salle. L’ambiance n’en est pas pour autant aseptisée grâce à toute une série de « Kleins » d’œil, certes inspirés de la culture folklorique hellénique sans sombrer dans le kitsch du pastiche. Combien de colonnes cannelées à chapiteaux surtout corinthiens estampillent les échoppes et tavernes servant des souvlakis ? De facture numérique et à chapiteau dorique, celles d’Egeo à Valencia sont fragmentées, leur chair minérale étant comme dévorée jusqu’à leur ossature lumineuse en tubes LED. Parfois, leur réduction à leur seul couronnement les mue en futiles consoles. Le bar qui articule les deux espaces de restauration semble avoir emprunté son design à une installation d’art contemporain électrisée de bleu. Plusieurs accessoires d’art de la table parsèment de la même couleur marine les pittoresques agapes. Détourner et dépayser avec malice mais sans trahir : mission accomplie.
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    L’esprit d’Issey toujours ici !

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    Architecture remarquable

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    Le récent réaménagement du Terminal 2 de l’aéroport Changi de Singapour — à moins qu’il ne s’agisse plutôt de son « paysagement » — par Boiffils Architectures déstressera les plus angoissés des passagers aéroportés. Pour sa première intervention aéroportuaire, l’agence française – internationalement reconnue jusqu’à présent pour ses fascinants centres commerciaux, magasins et hôtels de luxe – métamorphose le parcours (souvent du combattant) du voyageur en une expérience sensuelle et confortable aux portes de la « Ville Jardin ». Un Petit Poucet. Architectes d’intérieur, Jacqueline et Henri Boiffils créent leur agence il y a quarante ans. Ils choisissent d’exercer leurs talents dans le secteur du commerce, que leurs confrères ignorent ou dénigrent. En 1991, ils relookent complètement l’espace beauté du Printemps, salué par la presse et plébiscité par les clients. Repéré par une des deux « tigresses du shopping-mall » thaïes, le couple entame dès lors une collaboration fructueuse enchaînant les centres commerciaux qu’inaugure en 1994 le Siam Paragon et que EmQuartier couronne en 2015.. Rejoints, onze ans plus tôt, par leur fils Bazile architecte, ils ont pu y concilier enfin architecture et aménagement intérieur. Ayant su conserver une taille « artisanale », l’entreprise familiale maîtrise néanmoins tout aussi bien les concepts architecturaux et merchandising que la technologie, que ce soit dans l’Hexagone ou à l’étranger, tout particulièrement en Asie. D’où très certainement son invitation à concourir pour la rénovation des 120 000 m2 du Terminal 2 de l’aéroport Changi de Singapour. Ouverte en 1991 et rénovée en 2003, cette aérogare n’était plus à la hauteur d’un hub accueillant désormais plus de 70 millions de passagers malgré la construction de deux terminaux supplémentaires. Livré en 2019 et conçu par Moshe Safdie, le spectaculaire centre de transit Changi Jewel concentre cinémas, galerie commerciale, espaces de relaxation et jardins dont la cascade de 40 mètres de haut constitue l’attraction exclusive. Dessiné par Thomas Heatherwick, un cinquième terminal (aussi vaste que les quatre autres réunis) est désormais en chantier. Finalement, c’est David qui l’emporte en 2018 face aux Goliath de l’architecture aéroportuaire ! Itinéraire d’un voyageur serein. Le cahier des charges du commanditaire suggérait la piste d’un resort, les Boiffils lui substituent un paysage naturel faisant écho à la luxuriante végétation de cette cité-État pourtant si dense ! Ce ne pouvait que faire la différence en faveur de leur projet. Malgré l’épisode Covid, leur concept a été mis en œuvre en moins de trois ans aux côtés d’une maîtrise d’ouvrage exceptionnellement compétente. À l’image du client du grand magasin ou d’un hôtel, le passager doit être au cœur de la conception d’une aérogare. Il faut répondre à ses besoins et anticiper ses appréhensions, voire ses phobies, tout en stimulant sa curiosité et son plaisir, quels que soient son âge, sa nationalité, son genre et ses goûts. Il est indispensable d’y gommer les contraintes et les obstacles ou tout du moins les réduire au minimum. Voyageurs – souvent en terre inconnue – et accompagnants redoutent le gigantisme au fonctionnalisme exacerbé – y compris sécuritaire – des aéroports. S’y repérer y est donc encore plus primordial que dans un shopping-mall. Pour ce faire, rien de tel qu’ouvrir leur champ visuel, créer des transparences, des repères, des stimuli. Et

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