Architecture remarquable

Le Visionnaire, saisir ce qui commence

Abonnés
Par Lionel Blaisse, le 9 décembre 2024.
Image
© Nicolas Anetson

Mise en œuvre par Alain Moatti, la rénovation de la légendaire adresse de L’Oréal du 14 rue Royale devait offrir une plongée dans l’âme de la Maison et une exploration profonde du monde pour permettre à ses collaborateurs d’y inventer ensemble le futur de la beauté.

À l’abri des regards derrière ses historiques façades classiques, une pièce d’architecture contemporaine connecte un véritable incubateur de créativité dont chacun des 21 espaces spécifiques fait appel au meilleur de la technologie – intelligence artificielle comprise. Réunissant le passé, le présent et l’avenir, Le Visionnaire symbolise par sa forme ovoïde le lieu où tout commence.

Une marque auréolée de gloire.

Tout débute en 1907 lorsqu’un jeune chimiste de 26 ans d’origine alsacienne, Eugène Schueller, invente un procédé de teinture capillaire de synthèse pour cheveux blancs dont il dépose le brevet baptisé l’Auréale, coiffure crantée fort prisée à l’époque. La Société française de teinture inoffensive pour cheveux est créée deux ans plus tard. Jusqu’au décès de son associé Pierre Spéry en 1936, ils vont développer et diversifier leurs activités (savon, shampoing, ambre solaire, édition de magazines de beauté et coiffure…). Devenue en 1939 la SA L’Oréal, l’entreprise s’installe au 14 rue Royale dans un immeuble à l’angle de la rue Saint-Honoré dessiné par Ange-Jacques Gabriel dans le prolongement de la place Louis-XV érigée en 1772 — aujourd’hui de la Concorde — dont il était l’architecte. Les façades et toitures sont d’ailleurs classées Monument historique en 1949. Eugène Schueller y installe immédiatement une académie de coiffure au troisième étage où près de 1,2 million de coiffeurs auront été formés depuis.

Recruté en 1942 à la suite d’une petite annonce par Monsavon, François Dalle – juriste de 24 ans – va révéler ses qualités d’entrepreneur qui vont le conduire à la direction de L’Oréal en six ans.

Galerie d'images (18)
    Partagez cet article autour de vous
    Facebook
    Twitter / X
    LinkedIn
    Pinterest
    E-mail

    L’Oréal

    14, rue Royale

    75008 Paris

    www.loreal.com

    Agence Moatti-Rivière

    22, rue de Paradis

    75010 Paris

    Tél. : +33 (0)1 4565 44 04

    www.moatti-riviere.com

    Retrouvez cet article dans le nda numéro 57
    Image

    Projets remarquables

    Commander

    À découvrir
    Image
    Architecture, l'esprit du lieu

    Le nouveau temple du WellworkingTM

    Par Nat Lecuppre, le 15 septembre 2025
    Kwerk, le leader des espaces de bureaux partagés premium, vient d’ouvrir les portes de son cinquième établissement parisien. Situés au 16, avenue de Messine, dans le 8e arrondissement, les 4 300 m2 sont signés de l’architecte-designer Albert Angel. Depuis leur rencontre et la création de Kwerk en 2015, Albert Angel et Lawrence Knights continuent de tracer leur route discrète mais certaine de leur développement avec des adresses toujours aussi prestigieuses. Les lieux qu’ils nous proposent sont majestueux et marqués par une architecture singulière qui marie le site à son histoire. Souvent, le patrimoine est revisité au travers d’une alliance de tradition et modernité. Les valeurs chères aux fondateurs se retrouvent toujours. À savoir, un subtil raffinement dans les moindres détails et l’artisanat d’art d’exception. Chaque site est pensé comme une pièce unique de collection qui provoque des émotions fortes et positives. Kwerk Messine. À Messine, les codes de l’hospitalité 5 étoiles sont repris pour concevoir des environnements de travail somptueux. Le site est un ancien bâtiment haussmannien de 1875. L’architecte joue avec la configuration et l’architecture du lieu en associant sa vision contemporaine et son audace. Sa source d’inspiration, il va la puiser auprès de l’artiste sud-coréen Do Ho Suh. Ce dernier défie avec ses œuvres la perception des échelles et les lois de l’attraction. Elles sont spectaculaires et poétiques, monumentales mais en même temps pleines de légèreté. Elles marient le réel et l’imaginaire. Il n’hésite pas à concevoir des sculptures architecturées colorées avec du tissu polyester. En s’en inspirant, Albert Angel va dessiner le décor des lieux et vous inviter dans un univers poétique et cinétique. Le lobby qui est la pièce maîtresse des lieux en est l’illustration. Une grande coupole telle une toile d’araignée suspendue dans l’espace. Immaculée, elle est lumineuse et semble être un mirage. Pour sa réalisation, il a fallu aux artisans français 7 000 heures de travail. L’architecte joue avec les proportions et réinterprète les codes classiques de l’architecture. Avec audace, sa réinterprétation interpelle. Les moulures sont revisitées et surdimensionnées. On voit également sa signature dans le mobilier sélectionné ou conçu par l’architecte. Les fauteuils du lobby sont fabriqués en céramique et en tissu bouclé. Ils se fondent dans le décor aux textures aériennes et à la lumière de la coupole. Les couleurs acidulées des chaises bistrot des collections Kartell habillées de tissus d’Emilio Pucci renforcent cet univers singulier et onirique. Place à l’art et à la poésie. À Kwerk Messine, l’expérience de travail est sublimée. Le Barista plonge les hôtes dans une ambiance apaisante et luxueuse. Elle est un clin d’œil aux old boys clubs avec des canapés Chesterfield fabriqués sur mesure. Dans cet espace, l’artisanat est mis en avant. Tel un édifice sacré, on trouve des vitraux retraçant les pages de l’histoire de Kwerk. Les jeux de lumière et de couleur soulignent cette atmosphère presque mythique. Les vitraux sont réalisés par Marie-Pierre Bouaziz et son atelier l’Âme du Vitrail. Repenser les lieux avec l’architecture. Comme dans le travail de Do Ho Suh, tous les espaces de Kwerk Messine sont un équilibre de
    Image
    Architecture un lieu

    20/20 pour Joseph 2.0 par AW2

    Par Lionel Blaisse, le 15 mai 2025
    La vague de rénovations de chais dans l’Hexagone se justifie, certes pour des raisons d’image de marques, mais avant tout pour intégrer de nouveaux process de vinification tout en améliorant les conditions de travail du personnel, comme l’illustre à merveille le tout récent site des champagnes Krug à Ambonnay. Il y a sept ans, la Maison Krug prenait la décision de regrouper toute la partie production de son activité viticole – depuis la collecte des moûts jusqu’au tirage – opérée depuis 180 ans dans ses locaux historiques rémois sur le site d’Ambonnay, dont le Clos éponyme – acquis en 1994 – constitue le fleuron de son vignoble. En 2019, Stéphanie Ledoux et Reda Amalou 1 remportent le concours d’architecture dont le programme est le fruit de deux années d’études préliminaires. Du rêve à la révolution. Lorsqu’il fonde son entreprise en 1843, le rêve de Joseph Krug est de « créer le meilleur champagne possible chaque année, quelles que soient les variations climatiques ». Pour ce faire, en philosophe de l’individualité et de la patience, il va explorer l’art de l’assemblage pour engendrer tous les ans des champagnes singuliers que ses héritiers sauront faire perdurer. Récoltant et vinifiant à la parcelle, la maison a su « épargner » une partie de ses meilleurs vins pour pouvoir recomposer à l’issue de chaque vendange des cuvées d’exception. Pour ce vaste projet « industriel », le choix d’Ambonnay – petite commune au sud de la Montagne de Reims d’un millier d’âmes et aux cinquante entreprises viticoles – répondait à la volonté de reconnecter ses cavistes aux vignobles, et non des moindres puisqu’ils œuvreront désormais en vis-à-vis du Clos d’Ambonnay, le plus prestigieux d’entre eux malgré ses 68 ares. D’ailleurs, l’une des contraintes programmatiques visait à ce que les nouvelles installations assurent harmonieusement la transition entre le bourg et les vignes alentours. Mais le vrai challenge consistait bien en la livraison d’un site de production technologiquement innovant, y compris en matière d’optimisation des conditions de travail de l’ensemble du personnel. Quand l’opération fut décidée, le commanditaire fit d’abord appel à GNAT Ingénierie – un maître d’œuvre spécialisé dans les domaines industriels et viti-vinicoles – qui deux ans durant étudia, expertisa, remit en cause avec le personnel et des professionnels l’ensemble des process, des flux, des usages et rituels en cours afin d’imaginer Joseph 2 comme le meilleur outil de travail possible de la profession. Il en résulta un plan en H avec deux grandes nefs jumelles. Celles-ci hébergent dans leur niveau supérieur huit celliers indépendants (4 300 fûts) et cinq cuveries totalisant 330 cuves inox. En effet, chez Krug, les vins tranquilles naissent en fûts de chêne (3 mois) mais vieillissent en cuves. Pour satisfaire au nombre important de cuves imposé par la vinification à la parcelle, le recours à des micro-cuves à double compartiment vertical (et non plus superposé) en a réduit l’encombrement, mais il a fallu résoudre auparavant les variations de pression occasionnées selon le remplissage d’un seul ou deux compartiments. Afin de ne plus avoir à travailler en hauteur en limitant à deux niveaux la superposition des fûts, la surface générale a été quasi doublée (9 500 m2), de même
    Image
    Talents

    L’esprit d’Issey toujours ici !

    Par Lionel Blaisse, le 10 février 2025
    L’esprit d’Issey Miyake est toujours aussi vivant deux ans après sa disparition. Paris – sa seconde patrie durant un demi-siècle – poursuit son odyssée créative grâce à son nouveau flagship mis en… Seine par son compatriote et designer Tokujin Yoshioka. Le Japonais qui voulait habiller la rue – ayant vécu en direct Mai 68 – a su transmettre sa passion pour cet espace presque infini, car sans cesse renouvelé entre le vêtement et le corps, à ses disciples qui l’explorent à leur tour. En réinventant « un compromis entre l’artisanat et la technologie, le savoir-faire et l’outil, le beau et l’utile, la forme et la fonction, la création et l’inachevé 1 », ils font vivre son concept A piece of cloth 2 ! Marques de fabrique(s). À peine diplômé en design de l’Université des beaux-arts Tama, Issey Miyake débarque à Paris en 1965. Âgé de 27 ans, il s’inscrit à l’École de la chambre syndicale de la couture. Après son passage chez Guy Laroche puis Givenchy, il sait que la haute couture ne sera pas sa tasse de… thé. Il fait un détour à New York avant de rentrer à Tokyo pour y créer en 1970 le Miyake Design Studio. S’il participe dès l’année suivante à la Design Week new-yorkaise, c’est dans notre capitale qu’à lieu deux ans plus tard son premier vrai défilé de prêt-à-porter. Réfutant les diktats de la mode, à commencer par l’inhumaine perfection des tops modèles, il ne cherchera jamais à suivre les tendances. Convaincu que le bonheur réside dans la modernité et la légèreté, ne se passionne-t-il pas pour la matière, de sa fabrication à sa mise en œuvre qu’elles soient artisanales ou technologiques. Qui aime bien châtie bien ; son insatiable curiosité créative va l’amener parfois à maltraiter cette seconde peau, qu’il plisse, gaufre, tatoue, soude, ébouillante, scarifie, voire la brûler. Il collabore avec autant d’appétence avec les manufactures, les ingénieurs et chimistes qu’avec les artistes et designers, de Christo à Ettore Sottsass ! Renaissance ou Restauration ? Les quatre hôtels particuliers regroupés pour héberger les studios d’Europe 1 ont retrouvé leur intégrité à la suite du départ de la chaine de radio. Démarrés en 2018, le chantier de cette restauration d’envergure – baptisée Renaissance – s’est longtemps dissimulé derrière une palissade où les portraits des ouvriers en armure ou en bustier à fraise ont… défilé. Cependant, le transfert du flagship d’Issey Miyake Paris de la rue Royale à la rue… François-Ier n’a aucune signification symbolique si ce n’est de pouvoir saisir l’opportunité de passer du faubourg Saint-Honoré au Triangle d’or élyséen – temple planétaire de la Mode – en réinvestissant le rez-de-chaussée et le 1er étage d’un des hôtels rénovés ! Quant à la succession du maître, celui-ci a toujours su travailler en équipe et donner leurs chances à ses assistants. Il en avait été ainsi dès 1999 quand il avait transmis la direction artistique de ses collections à Naoki Takizawa pour mieux se consacrer à la création d’A-POC avec Dai Fujiwara. Traversés par la lumière naturelle, les 360 m2 aménagés par Tokujin Yoshioka se veulent presque éthérés. Prédominante, la blancheur des deux volumes futuristes

    Laisser un commentaire

    4 × quatre =